La quatrième tentative aura été la bonne. Depuis son passage à une version « block 2 », plus puissante et volumineuse en janvier 2025, aucun des trois exemplaires de la fusée Starship de l’entreprise SpaceX n’avait survécu à un aller-retour dans l’espace. Pire, en juin, le vaisseau explosait subitement lors d’un essai au sol.
Le 27 août 2025, la société spatiale d’Elon Musk a conjuré le mauvais sort. Une heure et six minutes après son décollage, le 10e Starship a amerri en douceur et à la verticale dans l’océan Indien, mettant fin à un vol d’essai pour lequel tous les objectifs ont été remplis.
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Le premier étage Super Heavy amerrit
Il est 18h30 à Boca Chica au Texas, sur le site de la « Starbase » où sont fabriqués les Starship, lorsque l’engin de 123 m de haut décolle. Moins de trois minutes plus tard, dans un enchainement dorénavant maîtrisé, ses deux étages se séparent. Le premier dit « Super Heavy » réitère alors la manœuvre de retournement déjà réussie lors du 9e essai, avant de redescendre en direction de son point de départ. Non pas pour être rattrapé par la tour de lancement, mais dans le golfe du Mexique dont il a atteint la surface de façon contrôlée, évitant ainsi la destruction dont il avait été victime en mai.
Cette fois-ci, SpaceX est même allé un peu plus loin, gardant volontairement éteint l’un des trois moteurs internes chargé de freiner le Super Heavy. Gage de fiabilité, l’allumage d’un moteur externe a alors permis de compenser cette défaillance simulée.
Déploiement de huit « Starlink »
Une fois placé sur une trajectoire suborbitale, le deuxième étage dit « Starship » a poursuivi sa course. À 190 km d’altitude, il est enfin parvenu à déployer dans l’espace huit satellites inertes, imitant par les dimensions et la masse les imposants satellites Starlink de nouvelle génération.
Par cette démonstration réussie, SpaceX est sur la voie d’employer son Starship afin de faire gonfler les rangs de la mégaconstellation Starlink. Fournissant aujourd’hui internet à plus de cinq millions d’utilisateurs, ses effectifs sur orbite ont passé la barre des 8000 satellites sur orbite en août 2025.

Rallumage d’un moteur
A t + 37 min 55, SpaceX est ensuite parvenu à rallumer dans l’espace l’un des six moteurs Raptor du Starship. La seconde fois depuis novembre 2024. La première dans le cas d’un Starship « block 2 ». Cette étape est importante pour démontrer que le vaisseau de plus de 50 m de long est capable de freiner pour redescendre sur Terre de façon contrôlée, sans risquer de vagabonder sur orbite terrestre après l’avoir atteinte. Jusqu’à présent suborbitaux, c’est-à-dire le long de trajectoires retombant naturellement dans l’atmosphère terrestre, les prochains vols d’essai du Starship pourraient être orbitaux, jusqu’à faire plusieurs fois le tour de la Terre.

Descente maîtrisée
Dernier accomplissement de taille de ce 10e vol, le bouclier thermique a protégé le Starship des échauffements subis à plusieurs milliers de kilomètres par heure tout au long de sa rentrée atmosphérique. Tandis que le vaisseau survolait l’océan Indien d’ouest en est, ses quatre ailettes sont parvenues à maintenir sa bonne orientation, lui permettant de présenter vers l’avant son ventre recouvert de tuiles thermiques. « Le bouclier thermique et la structure [du Starship ont été] intentionnellement sursollicités pour repousser les limites des capacités du véhicule », selon SpaceX. Survivre à une rentrée atmosphérique, parvenir à viser un lieu précis sur Terre, puis se retourner à la verticale en décélérant jusqu’à une vitesse nulle sont les étapes qu’il s’agit de maîtriser dans le but de récupérer et réutiliser le Starship, comme l’ambitionne SpaceX.

La Lune et Mars encore loin
Si ce 10e vol du Starship est un succès, le chemin est encore long avant que SpaceX ne soit prêt à poser l’un de ces vaisseaux sur un autre monde. Sélectionné pour être l’atterrisseur lunaire des astronautes de la mission américaine Artemis 3 encore officiellement annoncée en 2027, le Starship devra démontrer sa capacité à refaire le plein de carburant en orbite terrestre. Ça n’est qu’à ce prix que l’imposant vaisseau saura se propulser suffisamment vite pour quitter l’orbite terrestre. Il en va de même pour le voyage vers Mars, que SpaceX prétend entreprendre dès 2026, souhaitant y poser deux Starship sans équipage. Après l’atmosphère terrestre, survivre à la rentrée atmosphérique de Mars sans s’écraser à sa surface sera un autre défi de taille.