Où sont les deltas de Titan ?

Surface de Titan. © Nasa
Titan possède des rivières se déversant dans des mers… sans dépôt de sédiments. Une équipe américaine s’étonne de l’extrême rareté des deltas sur le gros satellite de Saturne.

Dans le Système solaire, le monde glacé de Titan partage avec la Terre une particularité : celle d’avoir un élément liquide qui ruisselle à sa surface. Mais en matière de ruissellement, la comparaison s’arrête là a priori. Des chercheurs américains viennent de révéler une absence intrigante de deltas au bout de ses fleuves d’hydrocarbures. Seuls deux existent possiblement près du pôle Sud, ce qui représente seulement 1,3% des fleuves du satellite de Saturne.

Le constat est d’autant plus étrange que, sur Terre, ou même dans les anciennes vallées martiennes aujourd’hui asséchées, tout cours d’eau se termine par une zone de stockage sédimentaire… Du coup, ce résultat, tiré de l’étude des images radar de la sonde spatiale Cassini, intrigue.

Des rivages difficiles à repérer

Étudier l’embouchure des fleuves d’hydrocarbures sur Titan n’était pas simple. Le radar de Cassini (désintégrée dans l’atmosphère de Saturne le 15 septembre 2017) a permis de percer les nuages opaques de ce monde de 5000 km de diamètre pour en révéler les reliefs, les étendues d’hydrocarbures liquides et ses rivières… Toutefois, la transparence des hydrocarbures a rendu presque impossible de définir les zones côtières et fluviales.

 

Le hors-série “Les découvreurs de l’Univers” et le Ciel & espace n°600 ! 

Deux numéros disponibles sur notre boutique web et en kiosque (où le trouver ?)

Pour contourner cet obstacle, les chercheurs ont utilisé des données de la Terre. Ils ont transposé dans un logiciel les délimitations des côtes terriennes afin de rendre l’eau terrestre semblable aux liquides de Titan. Pari réussi : les scientifiques ont pu observer les limites de ces étendues liquides. « Sur des temps géologiques, on peut imaginer avoir des couches de matières variables d’un endroit à un autre », indique Daniel Cordier, planétologue et directeur de recherche au CNRS. Or, l’absence de deltas parait généralisée sur Titan. Ce qui est d’autant plus surprenant que sa surface subit des pluies d’hydrocarbures et leur ruissellement.

Propriétés similaires à l’eau

Les étendues liquides d’hydrocarbures sont composées de méthane et d’éthane. Ces molécules organiques sont liquides sur Titan, notamment grâce à sa température de -180°C en surface. Ces fluides sont en théorie tout à fait capables d’arracher au sol des particules par frottement et d’en capturer d’autres avec son contact direct avec l’atmosphère. L’explication de la rareté extrême des deltas se cache peut-être dans les comportements des hydrocarbures liquides, très différents de ceux de l’eau. 

« Viscosité plus faible, masse volumique moitié moindre, tension superficielle également inférieure, la différence la plus importante étant la faculté de dissoudre des espèces chimiques. L’eau est un très bon solvant. On met facilement beaucoup d’espèces chimiques en solution et cela marche très bien pour dissoudre. Ce n’est pas le cas du méthane liquide », souligne Daniel Cordier. Cette caractéristique pourrait donner un début d’explication aux faibles dépôts de sédiments observés.

Du travail pour Dragonfly

L’histoire de Titan reste à écrire. Cette lune possède « de la matière organique avec une composition dans l’ensemble inconnue. Toute une cohorte de molécules et de particules que l’on ne connait pas ou très peu », annonce Daniel Cordier. Cette part d’ombre pourrait être éclaircie avec l’arrivée en 2034 de la sonde Dragonfly. Ce drone de la Nasa réalisera des analyses directement dans l’atmosphère de Titan.

 

Si Titan vous intéresse : 

Recevez Ciel & Espace pour moins de 6€/mois

Et beaucoup d'autres avantages avec l'offre numérique.

Voir les offres

Nous avons sélectionné pour vous