Proxima du Centaure : un système planétaire complexe

La découverte d’un disque de matière autour de l’étoile la plus proche du Système solaire montre qu’un processus complexe est à l’origine de la planète Proxima b. Cela suggère aussi qu’elle n’est pas seule.

[ Mise à jour du 28 février 2018 : de nouvelles analyses des données d'Alma semblent infirmer le résultat de l'équipe de Guillem Anglada. Lire notre actu : Finalement, Proxima n'est pas entourée de poussières ]

 

Proxima Centauri devient une étoile de plus en plus intéressante pour les astronomes. Elle n’est plus seulement l’étoile la plus proche à être accompagnée d’une planète tellurique située dans sa zone habitable. Grâce au réseau d’antennes millimétriques Alma, au Chili, une équipe d’astronomes espagnols menée par Guillem Anglada, de l’Institut d’astrophysique d’Andalousie, a découvert qu’elle est entourée d’un disque de poussière. Cette matière, dont les particules ont des tailles de quelques fractions de millimètre à plusieurs kilomètres de diamètre, forme un anneau situé à plusieurs millions de kilomètres de l’étoile.

Une structure encore à détailler

Guillem Anglada explique : « Les images que nous avons obtenues sont en ondes radio, pas en lumière visible. Les résultats que nous présentons proviennent de premières observations exploratoires dans lesquelles l’anneau ne se voit pas encore avec une netteté suffisante pour savoir exactement à quelle distance il se trouve de son étoile. Mais avec nos calculs, nous avons pu estimer qu’il est de 1 à 4 unités astronomiques de l’étoile. » [NDLR : 1 UA = distance Terre-Soleil, soit 150 millions de kilomètres].

L’anneau de matière se trouve donc bien au-delà de l’orbite de l’exoplanète Proxima b, 1,3 fois la masse de la Terre, qui ne gravite qu’à 0,05 UA de l’étoile en suivant une période de 11,2 jours.

Toutefois, l’affaire n’est pas terminée. D’autres observations sont envisagées pour permettre d’en savoir plus, comme l’indique Guillem Anglada : « Nous espérons obtenir de nouvelles données prochainement grâce auxquelles on pourra voir une image nette de l’anneau ou des anneaux. Mais pour voir plus de détails cela nécessite des images meilleures qui demandent plus de temps d’observation. »

Une idée de l’inclinaison du système

Les données récoltées par Alma indiquent aussi la présence d’un autre anneau, plus froid, situé beaucoup plus loin de l’étoile. « Nous voyons cet anneau plus externe, situé à 30 UA, en utilisant une technique qui consiste à faire la moyenne des différentes parties de l’image, explique Guillem Anglada. De cette manière, nous pouvons avoir une estimation de sa taille et de son orientation. » Là aussi, il faudra d’autres observations pour arriver à produire une image directe.

Mais déjà, les données récupérées ont permis d’avoir une idée de l’inclinaison de l’anneau le plus large : approximativement 45°. Si l’autre anneau, interne, et Proxima b, tournent autour de leur étoile dans le même plan (ce qui n'est pas certain), alors cela explique pourquoi les astronomes n’ont observé aucun transit de la planète devant son étoile.

La piste d’une autre planète ?

L’équipe de chercheurs qui a mis en évidence les anneaux de Proxima Centauri annoncent aussi, dans leur article scientifique, qu’ils observent la trace de ce qui pourrait être un troisième anneau, à 1,6 UA de l’étoile. Ce signal reste peu évident et pourrait être une illusion. Toutefois, s’il se révèle réel (à confirmer, donc par de nouvelles observations), plusieurs hypothèses permettraient de l’expliquer. L’une d’elles consiste en un anneau de poussière qui serait circonscrit par une planète de la masse de Saturne, située à la même distance et bouclant son orbite en 5,8 ans. Les auteurs notent bien qu’à ce jour, aucune mesure de vitesse radiale de l’étoile n’a permis de déceler une dérive qui serait due à l’attraction gravitationnelle d’une telle planète. Une vérification à la portée du réseau d’antennes Alma.

Les vestiges de la construction des planètes

Reste à comprendre l’origine et l’histoire de ces anneaux. Guillem Anglada, avance une première hypothèse : « Proxima Centauri a un âge similaire à celui du Soleil : quelque 5 milliards d’années. Ces anneaux sont formés des restes de matériau qui n’a pas servi à la formation de planètes. Avec le temps, ces corps se sont télescopés entre eux, se disloquant en morceaux plus petits. Par conséquent, ce que nous voyons actuellement est une combinaison de poussière et de corps rocheux. Ce sont des ceintures similaires à la Ceinture de Kuiper ou à la Ceinture d’astéroïdes. C’est ce que nous cherchions. »

Quand on sait que les ceintures de petits corps dans le Système solaire résultent d’une histoire chaotique où les planètes se sont repoussées les unes les autres, éjectant de nombreux petits corps résiduels sur des orbites plus lointaines, l’existence d’anneaux de même nature autour de Proxima Centauri suggère un scénario complexe, chargé d’événements comparables. Avec, peut-être, à la clé, d’autres planètes autour de l’étoile.

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