J’observe le ciel à ma fenêtre (7) : nuits blanches avec étoiles filantes

Avec une fenêtre ouverte sur le ciel, le confinement peut aisément s’étendre jusqu’aux… confins de la Galaxie ! En cette fin avril, des planètes, des étoiles et des étoiles filantes sont à observer, du coucher au lever du Soleil.

Depuis le 16 avril 2020, dans sa course autour du Soleil, la Terre traverse une région particulière de l’espace : le sillage de la comète Thatcher (dont le nom n’a rien à voir avec la « dame de fer » ayant marqué le paysage politique dans les années 1980). Or, ce sillage est parsemé de poussières et de blocs perdus par la comète au cours de ses nombreux passages près du Soleil. Quand l’un d’eux entre dans l’atmosphère de la Terre, il se désintègre en une traînée lumineuse fugitive que l’on perçoit la nuit : c’est une étoile filante. Comme les étoiles filantes associées à la comète Thatcher semblent provenir de la constellation de la Lyre, on les appelle les Lyrides. Et on peut les apercevoir chaque année du 16 au 26 avril. En 2020, le maximum d’activité attendu a lieu le 22 avril, vers 7 h du matin (donc alors que le jour est déjà levé). Une belle activité reste possible dans la nuit du 22 au 23 avril.

Comment voir les Lyrides ?

La première chose qu’il faut avoir en tête, c’est que les Lyrides ne sont pas très nombreuses. Il ne faut donc pas s’attendre à lever le nez vers le ciel pendant quelques minutes pour en voir. Lors du pic d’activité, le 22 avant l’aube, il n’y en aura pas plus de 20 par heure. Concrètement, cela signifie qu’en ville, surtout si l’on dispose d’une portion de ciel restreinte, il est très difficile d’en apercevoir. À la campagne, loin des lumières gênantes, c’est plus facile mais cela nécessite quand même un peu de patience.

Mais ces étoiles filantes sont très rapides. Elles arrivent à environ 50 km/s. Et parfois, certaines Lyrides se montrent très brillantes, éblouissantes mêmes. Une fois disparues, elles laissent alors une étonnante traînée persistante pendant plusieurs secondes. Vous ne perdez donc rien à surveiller le ciel, quelle que soit la direction dans laquelle vous regardez, surtout dans la nuit du 21 au 22 avril. Comme ce spectacle reste très aléatoire et qu’une bonne surprise n’est jamais à exclure, nous vous invitons à veiller un peu, tout en observant les autres objets célestes facilement visibles en cette période.

Même si elles semblent venir de la constellation de la Lyre (étoile principale : Véga), les Lyrides peuvent apparaître dans n'importe quelle région du ciel.

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Vénus, reine du crépuscule

Cela n’a échappé à personne : il y a un astre excessivement brillant, le soir, en direction de l’ouest. C’est la planète Vénus. Dès que le crépuscule devient sombre, son éclat est si fort qu’il fait penser à un avion en approche, avec ses puissants phares braqués sur nous.

Vénus est en train de se rapprocher de la Terre. Elle est d’ailleurs la planète qui passe le plus près de la nôtre (au minimum 41 millions de kilomètres). Autour du 23 avril, elle se trouve à un peu plus de 72 millions de kilomètres.

Dans une petite lunette ou un télescope, elle apparaît comme un croissant blanc de taille assez généreuse. C’est normal : Vénus est aussi grosse que la Terre (environ 12000 km de diamètre). Il est encore un peu tôt pour l’apercevoir dans des jumelles 10x50. L’image du croissant est minuscule et comme elle est éblouissante, il est difficile de le distinguer. Mais vers la mi-mai, cela deviendra possible.

En attendant, il faut donc une lunette pour bien voir les formes de Vénus. Celles-ci ne se limitent d’ailleurs pas à sa phase en croissant. Dans un instrument d’au moins 100 m de diamètre, en grossissant 200 fois, vous pouvez peut-être remarquer que les pointes du croissant sont légèrement plus brillantes que le reste. Ce n’est pas une illusion. C’est tout simplement que les nuages polaires de la planète sont encore plus blancs que le reste de son épaisse atmosphère. Ce phénomène n’est pas visible systématiquement, mais ces dernières semaines, il est apparu de manière remarquable. Emmanuel Beaudoin, astronome amateur et collaborateur de Ciel & espace, l’a d’ailleurs photographié. Et vous, le voyez-vous ?

Capella, Sirius, Arcturus et Véga… des lumières à retardement

Même si vous habitez en ville, vous pouvez voir quelques-unes des étoiles les plus lumineuses du ciel. Par exemple, au-dessus de Vénus et légèrement à droite, vous remarquerez sans peine une belle étoile brillante : c’est Capella, de la constellation du Cocher. Il s’agit en fait d’un couple de deux étoiles, chacune ayant plus de 2,5 fois la masse du Soleil. Ces deux astres, très proches l’un de l’autre, ne peuvent pas être discernés individuellement, même au télescope. Songez simplement que la lumière que nous percevons actuellement de Capella, a été émise par la surface de la binaire voici plus de 42 ans. Ce délai est dû à la distance énorme qui nous en sépare. Exprimé en kilomètres, elle est voisine de 397362 milliards de kilomètres… C’est pour cela que les astronomes comptent en années-lumière (la distance parcourue par la lumière en une année à la vitesse de 300000 km/s). Donc, si vous avez 42 ans, la lumière reçue aujourd’hui de Capella a quitté l’étoile en direction de la Terre au moment de votre naissance…

On peut renouveler ce petit jeu avec quelques autres étoiles visibles en début de nuit. Au ras de l’horizon sud-ouest, vers 21 h 30, scintille l’étoile la plus brillante du ciel (rappel : Vénus n’est pas une étoile, mais une planète). Son nom : Sirius. Vous la voyez telle qu’elle était il y a 8,6 ans. Sirius est donc l’une des étoiles les plus proches du Système solaire.

À bonne hauteur, au sud, vous apercevrez Régulus, principale étoile du Lion. Sa lumière nous arrive après un voyage à travers l’espace de 79 ans.

À l’est, toujours à la même heure, une autre étoile très brillante se fait remarquer : Arcturus, de la constellation du Bouvier. En l’observant attentivement, on décèle que son éclat est légèrement orangé. Le message lumineux d’Arcturus nous parvient 36 ans après avoir été envoyé.

Enfin, au ras de l’horizon nord (ou alors, attendez vers 23 h, le temps qu’elle monte un peu vers le nord-est), une grosse étoile longe la ligne d’horizon, c’est Véga. Sa lumière est celle de 25 ans en arrière.

Aspect du ciel vers 22 h, avec les étoiles citées plus haut.

Bételgeuse et Antarès, les deux supergéantes rouges

En début de nuit toujours, il est aisé de repérer Bételgeuse : elle se trouve à plusieurs degrés à gauche de Vénus. Sa couleur orange est nettement perceptible à l’œil nu. Après plusieurs semaines d’un éclat nettement amoindri, Bételgeuse a retrouvé sa magnitude habituelle. Cette supergéante rouge d’une masse voisine de 15 fois celle du Soleil est l’une des plus proches candidates pour devenir une supernova. Le cataclysme peut survenir à tout instant, mais plus probablement dans quelques dizaines de milliers d’années. Bételgeuse se trouve à 700 années-lumière. Ecouter le podcast sur Bételgeuse.

Une autre supergéante rouge prend le relais quelques heures après que Bételgeuse ait disparu derrière l’horizon ouest : c’est Antarès. Celle-ci émerge de l’horizon sud-est peu après une heure du matin. Cette étoile de plus de 15 masses solaires et qui est si immense qu’elle engloutirait la Terre et Mars si elle se trouvait à la place du Soleil est distante de 550 années-lumière. Elle aussi peut exploser en supernova à tout instant…

Un instant de réflexion sur les étoiles

À ce stade de la nuit, on peut se poser un instant pour réfléchir sur ces étoiles. Notamment, le délai avec lequel leur lumière nous parvient peut susciter la question suivante : certaines des étoiles que nous voyons ont-elles en réalité déjà disparu ? Théoriquement, cela peut être le cas. Par exemple, si Bételgeuse a explosé en supernova il y a un an, nous la voyons toujours alors qu’elle n’existe plus. Et en considérant qu’elle est bien à 700 années-lumière, nous ne le saurons que dans 699 ans.

En réalité, sur les 3000 étoiles que nous pouvons voir à l’œil nu sous un bon ciel (donc loin des lumières des villes), statistiquement, aucune d’entre elles n’a cessé d’exister. Un tel changement ne pourrait survenir que dans le cas d’étoiles massives finissant en supernovae. Les autres mettent des millions d’années à s’éteindre. Or, ces étoiles massives sont finalement très peu à être visibles à l’œil nu. Par conséquent, c’est possible, oui, mais très peu probable. Ainsi, depuis l’Antiquité – disons depuis 3000 ans —, aucun observateur n’a constaté l’explosion de l’une des étoiles brillantes considérées par les astronomes actuels comme susceptible d’exploser…

Trois planètes dans le matin

La nuit se termine avec l’apparition d’un trio exceptionnel dans le ciel du matin : les planètes Jupiter, Mars et Saturne se suivent à la queue leu leu au ras de l’horizon sud-est.  Elles sont visibles à l’œil nu de 4 h 30 jusque vers 6 h. Depuis le mois dernier, leur ordre a changé. Mars, qui était en position centrale entre Jupiter et Saturne, se trouve maintenant la plus à gauche. Saturne est au centre. À droite, la plus brillante est Jupiter.

Mars, Saturne et Jupiter, vers 6 h, le 23 avril. Ces positions varient légèrement les jours autour de cette date.

À mesure que le temps passe, le trio évolue lentement vers l’horizon sud, qu’il atteint vers 7 h 30, alors que le Soleil est déjà levé. Même si ces planètes restent basses (attention, des immeubles, une colline ou des arbres peuvent suffire à les masquer), elles peuvent être observées au télescope. Compte tenu de l’épaisseur de l’atmosphère terrestre aussi proche de l’horizon, il ne faut s’attendre à des images très nettes, mais plutôt turbulentes. Cela doit suffire pour adopter un grossissement de l’ordre de 100x qui permet de voir les deux principales bandes nuageuses de Jupiter et de repérer ses quatre satellites galiléens. Dans les mêmes conditions, on doit apercevoir les anneaux de Saturne. Quant à Mars, même si elle se rapproche lentement, elle est encore bien loin pour y discerner quoi que ce soit à la surface. Son diamètre apparent avoisine les 7 secondes d’arc et hormis, éventuellement, une calotte polaire blanche, difficile de retrouver les régions sombres connues des observateurs.

 

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