Guerre en Ukraine : la fracture spatiale

La dégradation, voire l’arrêt des collaborations entre la Russie et les pays occidentaux s’accélère. L’image des techniciens du cosmodrome de Baïkonour effaçant les drapeaux des pays partenaires sur la fusée Soyouz censée décoller le 5 mars en est l’illustration.

Le lanceur Soyouz au sommet duquel se trouvent des satellites de la constellation OneWeb est sur son aire de lancement… Mais tout indique qu’il ne décollera probablement pas le 5 mars 2022, comme prévu initialement. Ce 2 mars, l’agence spatiale russe Roscosmos et son directeur, Dimitri Rogozin, ont diffusé une vidéo montrant ses techniciens en train d’effacer toute mention des pays partenaires de ce programme sur la coiffe de la fusée elle-même.

Méthodiquement, à l’aide de papier adhésif blanc, ils ont recouvert les drapeaux du Japon, du Royaume Uni, des Etats-Unis et de la France. Et très probablement d’autres ensuite. La vidéo, diffusée sur Twitter, est agrémentée du commentaire suivant : « Les lanceurs de Baïkonour ont décidé que, sans les drapeaux de certains pays, notre fusée serait plus belle. »

Quatre extraits de la vidéo de Roscosmos montrant l'opération de dissimulation des drapeaux des pays partenaires de OneWeb.

Un pas de plus vers une annulation de lancement

Plus tôt dans la journée, Dimitri Rogozin avait soumis le maintien du lancement au fait que les pays partenaires assurent que les satellites ne serviraient qu’à des fins civiles. Ce n’est malheureusement pas tout. Dans l’après-midi du 2 mars, Roscosmos a publié un nouveau tweet : « En raison de la position hostile du Royaume-Uni envers la Russie, une autre condition pour le lancement du vaisseau spatial OneWeb le 5 mars est le retrait du gouvernement britannique des actionnaires de OneWeb ». Autant dire que les chances de voir le lancement se réaliser ont chuté drastiquement. Le plus probable est que la fusée va être ramenée à son hall d’assemblage et les satellites sortis de sa coiffe…

Le Cnes et le CNRS prennent aussi leurs distances

Côté français, la journée s’est poursuivie par les annonces de deux de ses importantes institutions : le CNRS et le Cnes. Le CNRS a ainsi annoncé, dans un communiqué de presse, cesser toute collaboration scientifique avec la Russie. Le Cnes a fait état de la situation sur certains projets spatiaux, actant la décision unilatérale de la Russie de rappeler ses ressortissants présents au Centre spatial guyanais. L’agence spatiale française a indiqué : « L’arrivée imminente des nouveaux lanceurs Vega-C et Ariane 6 sur le marché permet d’envisager une reprogrammation des lancements institutionnels européens. Le Cnes a mis en œuvre les procédures permettant un départ rapide, sûr et encadré des ingénieurs et techniciens russes présents sur la base spatiale. » Le sort du rover martien Rosalind Franklin de la mission Exomars a également été évoqué : « S’agissant de la mission ExoMars, dont le départ en 2022 sur un lanceur Proton paraît compromis, les différentes options possibles sont actuellement étudiées au sein de l’ESA. »

L’image des drapeaux masqués sur la fusée russe Soyouz n’est que le symbole bien visible d’une fracture spatiale en train de s’ouvrir chaque jour un peu plus. Mais pouvait-il en être autrement dans le contexte de guerre actuel ?

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