L’Europe part chercher la vie sur Mars

Lancement de la mission Exomars 2016 (vue d'artiste). © ESA
Ce lundi 14 mars 2016, la sonde européenne ExoMars 2016 doit décoller de Baïkonour à bord d'une fusée russe Proton, pour rejoindre la planète rouge. Objectif : y déceler des traces de vie.

Treize ans après le lancement de la mission Mars Express, l'Agence spatiale européenne (ESA), avec la participation de l'agence spatiale russe Roscosmos, repart à la conquête de la planète rouge !

ExoMars a pour but de répondre à une question déjà ancienne : y a-t-il, ou y a-t-il eu, de la vie sur Mars ? Avec la sonde orbitale dont le décollage à bord d'une fusée russe Proton est prévu pour 10h31 (heure de Paris) lundi 14 mars 2016, depuis le cosmodrome de Baïkonour (Kazakhstan), elle vise à détecter les gaz rares de l'atmosphère martienne.

L'engin emporte également un atterrisseur, le module Schiaparelli, qui ouvrira le chemin pour une deuxième mission ExoMars pour déposer un rover à la surface de Mars.

Comprendre l'origine du méthane martien

Il n'y a pas que du dioxyde de carbone dans l'atmosphère martienne. Le Trace Gas Orbiter (TGO), le module principal de la mission qui entrera sur orbite martienne le 19 octobre 2016, a pour objectif de détecter ces autres gaz en très faibles proportions. Notamment le méthane, repéré à plusieurs reprises, et dont la présence sur cette planète est très mal comprise.

« Le PFS (Planetary Fourier Spectrometer) embarqué sur Mars Express avait effectué des mesures sur le méthane observé dans la région de Syrtis Major, mais les résultats ont été peu probants », révèle Francis Rocard, responsable de l'exploration du Système solaire au Cnes. De fait, Curiosity, le rover de la Nasa, n'en avait décelé aucune trace.

Vue d’artiste de Trace Gas Orbiter, d'Exomars 2016. © ESA.

Le méthane présent en infimes proportions sur Mars peut avoir plusieurs origines. Il est tout à fait possible qu'il soit l'œuvre d'une activité géologique ; Mars possède le plus gros volcan du Système solaire (Olympus Mons), et même si la machine géologique martienne semble assoupie, elle restait encore très active dans un passé récent. « Les dernières coulées de lave sur Mars datent de quelques millions d'années seulement », indique Francis Rocard. « Tout comme les volcans d'Auvergne, les volcans martiens ne seraient peut-être pas tous éteints ! »

Sachant que 90 % du méthane présent sur Terre est produit par les organismes vivants, il est légitime de se demander si le méthane martien n'est pas plutôt produit par des micro-organismes extraterrestres présents sous la surface. « C'est le côté le plus excitant de l'histoire ! » s'enthousiasme Francis Rocard.

En plus de sa mission scientifique, TGO servira de relais de communication pour le rover d'ExoMars 2018 qui ira se poser directement sur la planète.

Un atterrissage à haut risque

En plus d'expliquer l'origine des gaz rares de l'atmosphère martienne, la mission ExoMars 2016 doit relever un autre défi : se poser sur la planète rouge grâce à l'atterrisseur de 600 kg nommé Schiaparelli. Si les Américains ont réussi l'exploit à plusieurs reprises depuis 1976, les Européens ne s'y sont essayé qu'une seule fois avec Beagle 2 en 2003. L'atterrisseur britannique s'est bien posé sur Mars, mais les panneaux solaires ne se sont pas correctement déployés, et le contact n'a jamais pu être établi.

L'ESA va-t-elle bénéficier du savoir-faire des Américains en la matière ? C'est peu probable tant ces derniers ne sont pas du genre à partager leur expérience acquise : « Avec eux, la science est ouverte, mais la technologie est fermée ! », lance Francis Rocard. Les Européens pourront s'inspirer de l'atterrissage réussi de Huygens à la surface de Titan en 2005, même si « pour Titan, c'était plus simple car l'atmosphère y est plus épaisse que sur Mars », facilitant ainsi la décélération de l'atterrisseur à l'approche de la surface.

Descente finale du module Schiaparelli sur Mars. © ESA/ATG Medialab.

Schiaparelli n'est qu'un atterrisseur technologique. S'il arrive à se poser, ses batteries sont prévues pour durer quatre jours et effectuer que peu de mesures. Une caméra prendra des images de sa descente à travers l'atmosphère martienne, avant d'atteindre Meridiani Planum, son site d'atterrissage. En revanche, aucun paysage martien ne sera photographié...

Schiaparelli est indispensable pour préparer ExoMars 2018 qui prévoit de déposer un rover à la surface de Mars. Après les mesures rapportées par ExoMars 2016, le rover de 310 kg pourra, à l'aide de sa foreuse, creuser jusqu'à 2 m de profondeur et compléter les analyses livrées par le TGO.

Échec interdit pour la fusée Proton

Après que la Nasa a quitté le projet en 2012, l'ESA s'est tournée vers la Russie pour boucler le financement d'Exomars. C'est donc une fusée russe Proton qui servira au lancement, au lieu du lanceur américain Atlas. Or, Proton a connu des déboires ces dernières années. En effet, le principal lanceur lourd russe recense 47 échecs sur ses 409 lancements, soit un taux de réussite de moins de 90%. Or, pour une mission aussi couteuse qu'ExoMars (1,2 milliard d'euros), l'échec au lancement n'est pas permis.

La fusée Proton qui doit emporter la mission Exomars 2016. © KhSC

Jorge Vago, responsable scientifique du projet ExoMars à l'ESA, semble cependant confiant quant à la réussite de la mission : « Roscosmos reste aussi intéressée que l'ESA quant à la réussite de la mission. ExoMars 2016 constitue la première étape de notre collaboration et ouvre la porte à la prochaine étape, bien plus ambitieuse, que constitue l'envoi du rover en 2018. De plus, l'ESA a conduit les tests conjointement avec Roscosmos, notamment pour assurer la communication entre la fusée et ExoMars. »

Découvrez l'intégralité du dossier consacré à la recherche de la vie sur Mars dans Ciel & Espace de mars/avril 2016, en kiosques à partir du 15 mars 2016.

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