Planète en vue autour de Bêta Pictoris

La nouvelle planète se trouve tout près de Bêta Pictoris (au centre et masquée artificiellement), sur cette image composite du disque de poussière de l’étoile, vu par la tranche. Crédit : ESO/A.-M. Lagrange et al

Une équipe française a très probablement découvert une jeune planète gazeuse en formation autour de l’étoile Bêta Pictoris, à 70 années-lumière de la Terre. D’une masse de 8 fois celle de Jupiter, cette planète semble tourner sur une orbite comparable à celle de Saturne autour du Soleil. Autrement dit, elle croise à environ un milliard de kilomètres de Bêta Pictoris. Jamais auparavant une planète n’avait été photographiée aussi près de son étoile. La découverte, réalisée grâce des clichés pris avec le Very Large Telescope, au Chili, revêt un caractère particulier. En effet, Bêta Pictoris est la première étoile autour de laquelle, dès le début des années 1980, les astronomes espéraient découvrir des planètes. A cette époque, le satellite américain IRAS avait repéré un énorme disque de poussière vu par la tranche autour de l’étoile. Celui-ci était considéré comme un système planétaire en formation. De fait, Bêta Pictoris n’est âgée que de 12 millions d’années. Mais jusque-là, malgré une accumulation d’indices, aucune planète n’avait pu être détectée directement. En suivant ces indices, l’équipe d’Anne-Marie Lagrange, du Laboratoire d’astrophysique de Grenoble, vient de mettre en évidence un petit point lumineux, exactement dans le plan du disque de poussière, tout près de l’étoile, sur des clichés du VLT datant de 2003. “C’est là qu’on s’attendait à trouver une planète, confirme Daniel Rouan, de l’observatoire de Paris, membre de l’équipe. La déformation du disque et la présence d’anneaux de poussière indiquaient qu’il devait y avoir un corps massif à environ 10 unités astronomiques de Bêta Pictoris.”

Trahie par une éclipse en 1981 ?

Leur résultat, publié dans la revue Astronomy and Astrophysics, relance une autre découverte, faite en 1994 par une équipe menée par Alfred Vidal-Madjar, de l’IAP : sur des données photométriques de 1981, l’éclat de Bêta Pictoris avait brusquement diminué pendant quelques heures. Mais l’événement, qui laissait supposer le passage d’une planète massive devant l’étoile, n’avait jamais pu être revu et confirmé… Ravi de la découverte de ses collègues, Alfred Vidal-Madjar déclare : “Il est tout à fait possible que la planète repérée aujourd’hui soit la responsable de l’occultation que nous avions suspectée. Comme elle n’a pas plus de 12 millions d’années, si sa masse est de 8 fois celle de Jupiter, selon les modèles, son diamètre peut être de 2 fois celui de Jupiter. Ce qui est conforme à nos estimations.” Reste à vérifier. Pour cela, l’équipe d’Anne-Marie Lagrange procède à de nouvelles observations pour voir si, depuis 2003, l’objet s’est déplacé sur une orbite. Si c’est le cas, les astronomes pourront reconstituer l’ensemble de cette orbite, ainsi que sa période et son inclinaison. Si tout cela converge vers un nouveau passage devant l’étoile aux alentours de 2015, cette planète pourrait devenir, rétrospectivement, la première jamais détectée autour d’une autre étoile que le Soleil. "On n'a pas fini de parler de Bêta Pictoris", conclut Anne-Marie Lagrange.

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