La première brique du vivant détectée sur la comète Chury

La comète Chury et sa chevelure gazeuse. Crédit : ESA/Rosetta/Navcam
La sonde Rosetta a permis d’identifier la glycine, qui est l’un des acides aminés qui entrent en jeu dans la composition des protéines. Une détection qui éclaire les spécialistes sur les conditions initiales d’apparition de la vie dans le Système solaire.

La vie se fonde sur deux types de molécules complexes : les acides nucléiques (ADN, ARN) et les protéines. C’est l’un des composants des protéines, la glycine, que l’instrument Rosina, monté sur la sonde Rosetta vient d’identifier formellement dans la chevelure de la comète Churyumov-Gerasimenko – alias Chury.

Une découverte rassurante

Pour les astronomes, cette découverte est rassurante car elle en confirme une autre réalisée en 2009 après analyse des échantillons microscopiques de la comète Wild 2 (l’une des rares comètes approchées par un vaisseau automatique), qui avaient été rapportés sur Terre par la sonde Stardust. Là aussi, de la glycine avait été trouvée. Mais comme elle provenait de grains qui avaient percuté le panneau d’aérogel de la sonde et qui avaient été ensuite exposés à de l’eau, il n’était pas exclu qu’elle se soit formée a posteriori (même si cela était à partir de matériau cométaire).

Dans le cas de Rosetta, la détection est directe, à partir de gaz et de poussières collectées par la sonde tout près de la comète Chury en août 2015. « C’est une mesure en phase gazeuse qui a été effectuée, explique Hervé Cottin, spécialiste d’astrobiologie au LISA. C’est plus direct ; l’instrument a mesuré la masse d’une molécule qui ne peut pas être autre que de la glycine. »

La brique la plus simple

« La glycine est le plus simple des acides aminés », indique Hervé Cottin. C’est aussi le seul de ces acides aminés qui peut se former sans la présence d’eau liquide. Or, les mesures de Rosetta n’ont pas permis d’identifier d’autre acide aminé, tel que la bêta-alanine qui avait pourtant aussi été suspectée dans les échantillons de la comète Wild 2. Là encore, le fait que les grains aient été en contact avec de l’eau laisse ouverte la possibilité pour que cet acide aminé se soit formé lors des analyses en laboratoire.

Si au contraire Rosetta n’a pas trouvé trace de cette autre brique des protéines, c’est soit parce qu’elle était présente en quantité trop infime, soit parce qu’elle était absente. La seconde possibilité semble plus en accord avec ce que l’on sait de la chimie des comètes qui, à aucun moment de leur existence, n’ont pu posséder d’eau liquide.

Un grand pas à franchir jusqu’à l’apparition de la vie

La détection de la glycine permet donc aux astronomes de conforter le tableau qu’ils se faisaient des conditions initiales et du rôle qu’ont pu jouer les comètes dans l’apparition de la vie sur Terre. Mais, comme le souligne Hervé Cottin :

La glycine est peut-être la première pierre. Mais entre la glycine et la vie, il a encore beaucoup de choses qui nous échappent.

Cet acide aminé a en effet pu se former dans les glaces des comètes voici plus de 4,6 milliards d’années et ensuite venir se déposer sur Terre lors des multiples chutes de ces objets qui ont eu lieu depuis. D’autant que la proportion de matière organique dans une comète est importante : au moins 50% par rapport aux composés minéraux. Il reste que le vivant a besoin de 20 acides aminés différents pour constituer, avec des milliers de combinaisons, une protéine…

Si cette découverte ne résout pas la question de l’apparition de la vie sur Terre, elle indique qu’au moins l’une de ses molécules complexes indispensables a pu se former dans l’espace. C’est un début.

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