Occultation record d’une étoile par Pluton

TRAPPIST est un télescope automatique de 60 cm pilotable à distance et installé au Chili, à l'observatoire de La Silla. Crédit : E. Jehin/ESO

Le 4 mai 2013, la planète naine Pluton a occulté une étoile ; cet événement rare et riche d'informations scientifiques a été suivi depuis le Chili par de nombreux télescopes.


Le télescope chilien des Belges au Maroc


Samedi matin vers 8h30, heure du Maroc, l'astronome Emmanuël Jehin et ses deux doctorantes Alice Decock et Cyrielle Opitom, de l'Institut d'Astrophysique de Liège, ont observé à distance l'occultation d'une étoile par la planète naine Pluton.

Ils se trouvaient à Marrakech pour l'école d'astronomie OISA 2013 consacrée aux petits corps du Système solaire (comètes, astéroïdes...). Devant quelques lèves-tôt, ils ont pris les commandes du télescope belge TRAPPIST. Un instrument de 60 cm, basé à l'observatoire de La Silla au Chili, et entièrement pilotable à distance.

« Nous avons pu observer en temps réel l'étoile faiblir en raison du passage de Pluton - moins lumineuse - juste devant elle. C'est une belle réussite. C'était un moment d'émotion car on n'est jamais certain que cela va se produire, l'alignement des astres devant être parfait ! De plus, la courbe est superbe car l'étoile était brillante, et on a eu un transit de quasiment 5 minutes. C'est un record », se félicite Emmanuël Jehin.

Une mobilisation générale

D'autres observateurs situés en Amérique du Sud ont suivi cet événement rare. « Les observations en lumière infrarouge avec un des géants du Very Large Telescope (VLT) ont été aussi un succès. La courbe de lumière révèle des détails uniques. »

« Alain Maury, au nord du Chili, a également suivi le phénomène avec quatre télescopes. Il y a des observations issus d'autres télescopes encore dans les observatoires des pays voisins », précise Emmanuël Jehin. Le phénomène a notamment été suivi au Brésil en Aregentine, Chili et au Pérou.

De l'astronomie de précision


Ces données seront ensuite analysées à l'Observatoire de Paris-Meudon par l'équipe de Bruno Sicardy. C'est à partir de telles observations qu'il a été possible de connaître précisément la taille de Pluton (et de quelques autres objets de Kuiper, situées au-delà de Neptune, comme Eris et Makémaké).

Mais il y a plus. La forme de la courbe de luminosité de l'étoile occultée nous renseigne sur les conditions reignant dans l'atmosphère de Pluton. L'équipe de Bruno Sicardy utilise ces données notamment pour étudier la faible atmosphère du lointain corps (quelques millionièmes de notre propre
atmosphère). Aisnsi, des fluctuations saisonnières ont pu être mises en évidence.

La courbe de lumière obtenue par TRAPPIST montre bien la présence d'une atmosphère. La baisse de luminosité se produit lentement, selon une pente. S’il n'y avait pas d'atmosphère, la baisse serait brutale, quasi immédiate.


Ci-dessous : la courbe obtenue avec le télescope TRAPPIST. Elle montre la baisse de luminosité
de l'étoile ocultée par Pluton pendant près de 5 minutes.

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