Cérès, un intrus dans la Ceinture d’astéroïdes

La planète naine Cérès ne serait née dans la Ceinture d’astéroïdes, où elle se trouve maintenant… © Nasa/JPL-Caltech/UCLA/MPS/DLR/IDA
Une équipe de chercheurs français révèle que la planète naine Cérès est recouverte d’un voile de poussières venues d’autres corps célestes. Un saupoudrage qui masquait jusqu'ici ses vraies origines.

Cela fait peut-être deux siècles que les scientifiques se trompent sur Cérès. Avec ses 1000 km de diamètre, la planète naine est considérée comme le plus gros astéroïde, notamment parce qu'elle affiche la même couleur que la majorité des astéroïdes de la Ceinture principale, où elle orbite. Mais Cérès vient peut-être en réalité de la Ceinture de Kuiper, un gigantesque réservoir de corps glacés situé au-delà de la planète Neptune.

Un voile trompeur de poussières

L'équipe de Pierre Veznazza du Laboratoire d’astrophysique de Marseille (LAM) a découvert que Cérès est recouverte d'un camouflage qui la fait ressembler à ses voisins. Avec le télescope SOFIA, les chercheurs ont mis en évidence à sa surface un voile de particules très sèches, qui ne semble pas provenir de la planète naine.

Cérès est en effet particulièrement riche en eau. À sa surface, il y a des geysers, peut être des volcans d’eau (lire Ciel & Espace n°550, p. 14), de la glace affleurant dans certains cratères et des minéraux hydratés, mais rien pour expliquer la présence de ces particules anhydres (sans eau).

Le mont Ahuna sur Cérès, soupçonné d’être l’indice d’un volcanisme froid
crachant de la boue salée.
© Nasa/JPL-Caltech/UCLA/MPS/DLR/IDA 

En cherchant l’origine de ces poussières étrangères, l’équipe a repéré un ensemble d’astéroïdes bien précis (appartenant à la famille de Thémis, 24e corps découvert dans la Ceinture d’astéroïdes) qui ont la même composition chimique que les particules trouvées. Ce seraient les chocs entre ces astéroïdes qui saupoudreraient Cérès de poussières.

L’origine lointaine de Cérès renforcée

En montrant que la ressemblance de Cérès avec les autres corps de la Ceinture d’astéroïdes n’est liée qu’à des particules étrangères, les chercheurs français renforcent l'hypothèse de son origine glacée, déjà émise en 2015. La sonde américaine Dawn avait alors détecté à sa surface des argiles riches en ammoniac. Or, cet élément ne peut s’être condensé (être glacé) dans la zone où évolue actuellement la planète naine. Il lui faut pour cela une température bien plus faible, comme celle qui règne dans la lointaine Ceinture de Kuiper.

Formée au-delà de Neptune avec les autres objets transneptuniens, Cérès aurait été catapultée ensuite vers l'intérieur du Système solaire. Un événement qu'explique très bien le scénario dynamique d’évolution des planètes appelé “modèle de Nice”.

Selon ce scénario, la migration des planètes géantes, au tout début du Système solaire, aurait perturbé la Ceinture de Kuiper et catapulté une grande partie des astres qu'elle contenait vers le Soleil. Cérès serait l’un d’eux. Quatre milliards d’années plus tard, la planète naine demeurerait le dernier témoin de ce billard planétaire.

Pollution dans le Ceinture principale

La poussière nous cachait donc depuis plus de deux siècles l’originalité de Cérès. « Il y a peu, j’aurais répondu sans hésiter qu’une telle “pollution” était impossible », explique Benoît Carry, co-auteur de l’étude. « Car au sein de la Ceinture principale, il existe des astéroïdes de couleur différente, ce qui suggère qu'ils n’ont pas été uniformisés par une pollution extérieure. » Pourtant bien réelle, celle-ci pourrait nous dissimuler les secrets d’autres membres de la Ceinture d’astéroïdes…

Le Boeing 747 modifié pour emporter le télescope SOFIA. © Nasa/DLR
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